Région Vassivière 8~9~10 Mai 2013

Il était convenu que nous nous retrouvions autour du lac de Vassivière, en Limousin, au Nord Ouest du plateau des Millevaches. Aucun point de chute précis n'avait été choisi : le premier participant arrivé dans les parages se devait d'avertir les autres de l'endroit exact où se retrouver.
Nous, (Martine et André), partis de Gap lundi 6 mai dans la matinée, échouâmes à Royères de Vassivière dans l'après-midi du mardi 7 mai, après avoir passé une nuit à plus de 1000m un peu avant Saint-Étienne. Une aire de services gratuites pour camping-car se trouve là, à Royères, au pied de l'église. Nous décidâmes d'y passer la nuit, bien que la quantité de CC présents avec paraboles déjà déployées ne nous souriait guère.
Dans la soirée, je contactai Corinne par bigophone portatif, laquelle m'apprit que seuls Guy et Carmela ainsi qu'elle-même et Alain se joindraient à nous. Il y avait eu des défections!
Qu'importe : nous nous en accommoderons!

Pour l'heure, installés parmi les autres comme au sein d'un troupeau, nous nous apprêtions à y passer la nuit quand, discutant avec un autochtone, j'appris qu'il y avait beaucoup mieux que le très touristique lac de Vassivière, si toutefois l'on appréciait davantage le calme et le naturel que la foule et le factice. Il s'agissait du lac de Lavaud-Gelade, situé à une dizaine de kilomètres de là, uniquement fréquenté par des connaisseurs, amateurs de pêche à la ligne, donc peu bruyants par principe. Cela me parut alléchant.

Nous nous y rendrons le lendemain

Trouver le lac en question n'est pas chose aisée, les indications routières étant particulièrement indigentes. Ceci explique d'ailleurs, peut-être, sa moindre fréquentation que Vassivière. Quoiqu'il en soit, nous y parvînmes et après avoir traversé le barrage de retenue qui forme le lac, nous bifurquâmes à droite, vers la première aire naturelle qui se présentait, celle de Pelletanges.
Il s'agit d'un camping, très limité en nombre de places malgré sa grande superficie boisée, herbeuse et pentue, d'accès gratuit hormis durant la période juin~septembre. Évidemment, hors saison, les services ne sont pas disponibles, mais un vieux camping-cariste, un vrai de vrai avec du poil aux pattes, ne se laisse pas arrêter par si peu. Nous nous installâmes donc, pour constater avec stupeur que l'endroit ne disposait pas de couverture téléphonique (pas SFR en tout cas). Il nous fallut donc repartir à Royères pour avertir les amis que les attendrions à Pelletanges

Cela fait, après retour et nouvelle installation pour un casse-croûte léger, il ne nous restait qu'à découvrir l'endroit qui est enchanteur. Les quelques occupants, tous camping-caristes, ne s'y sont pas trompés et ceux avec qui j'ai échangé civilement m'ont dit venir ici depuis longtemps, même en hiver lorsqu'il fait froid et qu'il n'y a absolument personne.

Si les environs incitaient à la flânerie, la météo sombre et changeante invitait à se munir du parapluie plutôt que de l'ombrelle. Sans oublier un douillet paletot sur les épaules, les sautes de vent amenant parfois des grains frisquets. Malgré tout, nous partîmes à la la découverte du lieu, sans presse inutile.

Poussant plus avant, nous reprîmes à pied la route qui nous avait conduits à l'aire de Pelletanges. Il ne pleuvait pas. Les champs en déclivité légère étaient couverts de fleurs parmi lesquelles dominait le pissenlit. Il y avait ainsi une sorte de luminosité chaude plaquée au sol qui venait ainsi suppléer l'absence de soleil. Ailleurs, des forêts humides et des prairies où paissaient de placides bovins roux accompagnaient notre cheminement.

Et soudain, nous arrivâmes sur l'aire naturelle Les Pondauds. Il n'y avait personne et contrairement à ceux de Pelletanges, les sanitaires et l'eau de ce camping, toujours gratuit hors saison, étaient disponibles. Un rayon de soleil dorait délicatement les arbres de la berge ; le vent s'était assoupi; on avait presque chaud.
Il nous apparut alors, d'une manière évidente, que nous devions passer ensemble, ici et pas ailleurs, les jours de réjouissance prévus.

Dès que les amis nous eurent rejoints, en fin de matinée du mercredi 8 mai, nous fonçâmes vers Les Pondauds. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, les véhicules furent rangés en camp retranché du Far West. C'est une habitude que nous avons, de nous regrouper de la sorte, pour nous isoler certes, mais surtout pour nous rapprocher et nous protéger des vents coulis fort désagréables lorsqu'ils sévissent.

L'avantage du dispositif est de pouvoir se restaurer à l'abri des regards fureteurs et des intempéries inopinées. Même les excès de propos, de bonne chère et de breuvages fermentés sont permis, car ils restent discrets. Nous distinguons, de gauche à droite :

Mais hormis se taper la cloche, débiter des sottises, rire de tout et de rien, se réchauffer au contact des uns et des autres, que pouvait-on faire dans une pareille contrée sous un semblable climat?
Tout simplement goûter à l'instant, être attentif à ce que l'oeil perçoit comme inhabituel, plus beau que d'ordinaire alors que ça ne l'est pas davantage mais que l'on juge tel parce que l'esprit est mieux disposé, le fixer sur carte mémoire à défaut de sa propre mémoire vite défaillante.
Ici, c'est un ciel charnu et son reflet rayonnant sur l'eau...

.. plus tard, c'est un clin de soleil malicieux qui illumine la verdure et déchire les nuages pour nous laisser entrevoir que le ciel bleu existe encore, et c'est comme une invitation à ne pas désespérer.

Il y eut aussi des promenades en groupe.
Aux nombreuses questions de Victoria, Carmela répondait en experte des plantes et des insectes qu'elle est. Le nombre de plantes comestibles est inimaginables lorsque l'on est habitué à se servir en hypermarché; on oublie que la nature est profuse, et qu'en dehors des tomates hydroponiques sans goût, des laitues bourrées de pesticides ou des fraises empoisonnées, elle offre bien des possibilités de substitution.
Guy, écologiste convaincu qui met son mode de vie en accord avec ses convictions, n'était pas en reste de commentaires et d'explications. Les promenades en devenaient plus savoureuses

Chemin faisant, nous rencontrâmes beaucoup de ces animaux bonasses, qui vous regardent d'un oeil doux sans cesser de ruminer. Il est plaisant de constater que toutes les vaches de France et d'ailleurs ne sont pas élevées en stabulation, contraintes comme des prisonniers d'antan mis aux fers.

Outre ces animaux impossibles à ignorer, il y avait bien d'autres bestioles insoupçonnées qui menaient leur vie discrète et indifférente à notre présence

En abaissant son regard, on découvrait quelque féerie. Il suffit d'un rien, parfois, pour enjoliver les choses communes

Que dire de plus? L'image parle d'elle-même et ne nécessite pas de discours.

Au premier plan : la chienne Puchy, tenue en laisse par l'infatigable Victoria.
Derrière, de gauche à droite : Guy, Carmela, Corinne, Martine, Alain

La même, prise par Corinne avec moi aux côtés de Martine. Il faudrait qu'un jour je pense à me munir d'un trépied et à recourir à la fonction retardateur de l'appareil.

Quand le froid, le vent et la pluie devenaient insupportables au jour déclinant, nous nous réfugions dans le plus petit LT du groupe, qui est paradoxalement le plus logeable : le LT d'Alain et Corinne.
Est-il nécessaire de préciser qu'il ne fut pas utile d'allumer le Truma, dont ce véhicule n'est d'ailleurs pas pourvu? La chaleur humaine ajoutée à la chaleur de cuisson des patates du jardin suffisait amplement à faire tomber la veste

Le vendredi, nous nous réveillâmes dans un matin glacial. Les pêcheurs environnants, qui participaient à un concours de pêche à a carpe durant 72 heures en continu, paraissaient frigorifiés bien qu'ils fussent emmitouflés. Nous décidâmes alors de lever le camp et de pousser jusqu'à Gentioux-Pigerolles, commune renommée pour son monument aux morts d'inspiration pacifiste, que Guy connaissait déjà de réputation. On le doit au maire de l'époque, Jules Coutaud, maréchal-ferrant, qui avait été gazé durant la guerre de 14-18.
La particularité du monument est de mettre l'accent sur la douleur des orphelins (et des veuves) de guerre et non sur l'héroïsme forcé des soldats malgré eux. La chose est assez singulière pour que nous y fissions un détour et une halte.
Informations complémentaires sur Wikipedia

Le temps sembla vouloir se mettre à la clémence.
Nous partîmes donc vers le sud du lac de Vassivère pour aller visiter son île, reliée à la terre ferme par un pont que l'on emprunte pédestrement ou à bord d'un petit train gratuit.
L'île est une sorte de musée à ciel ouvert consacré aux arts contemporains. Autant dire qu'il faut être connaisseur pour apprécier, faute de quoi on ne manquera pas de trouver hideuses la plupart les bizarreries proposées au regards ébahis.
Ainsi, cette Mercedès moutarde, affublée d'un lampadaire sur l'arrière-train, oeuvre d'un artiste qui n'a pas eu honte de signer son incongruité. En arrière-plan se trouve une tour conique résonnante au sommet de laquelle nous grimperons

Du haut de la tour résonnante, nous bénéficiâmes d'une vue imprenable sur le toit du musée d'Art contemporain où aucun d'entre nous ne jugea bon de payer le droit d'entrée pour admirer les choses qui s'y trouvaient

Une autre oeuvre d'art : le sous-marin jaune factice immobilisé à fleur d'eau dans le lac

Quittant l'île, il fut difficile de trouver un bivouac pour la nuit autour du lac. Il y avait là beaucoup trop de touristes venus profiter de l'endroit et d'une course de côte pour petits bolides pétaradants. Nous gagnâmes Eymoutiers, 87120, qui se définit comme la porte du Parc Naturel Régional de Millevaches. Il s'agit d'un village coquet, très bien entretenu, qui nous permit de camper sur un terre-plein, prés d'un terrain de tennis.
L'endroit était calme et dominait un plan d'eau des plus charmants.
Nous y passâmes une nuit tranquille après nous être tous tassés dans le LT d'Alain pour un dernier dîner en commun.

Samedi matin, Corinne et Alain, qui n'ont pas la chance d'être encore retraités, durent nous quitter de bonne heure (relativement) car des affaires à régler les attendaient avant de reprendre le collier. Ils s'en allèrent en donnant de la corne musicale, et presque dans la foulée il se mit à pleuvoir, sans qu'il y ait relation de cause à effet.
Nous partîmes peinardement un peu plus tard, rien ne nous pressant vraiment. Carmela, Guy, Victoria et Puchy suivirent de peu

Au terme de ce racontement, que dire qui n'ait déjà transparu, sinon que nous vécûmes là d'excellents moments, de ceux que l'on conserve précieusement au fond de soi pour s'y réchauffer lorsque le besoin d'amitié se fait ressentir.

J'en souhaite de semblables à tous les membres du forum, et même à tout un chacun que je ne connais pas : le monde y gagnerait en quiétude.