Babylone, de Yasmina Reza
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Babylone, de Yasmina Reza
Comédie policière mais pas que. Prix Renaudot 2016
En préambule :
Se précipiter sur les prix littéraires dès leur remise n'est peut-être pas le réflexe le plus pertinent; il faut laisser au temps qui passe le soin de décanter l'oeuvre et de voir s'il en reste quelque chose à déguster. Tant d'auteurs et d'écrits "incontournables" portés au pinacle ont disparu corps et biens dans les limbes de l'oubli qu'ont se devrait à la prudence. Je n'y ai pourtant pas cédé, et je crois que j'ai bien fait en l'occurrence.
L'auteur :
Ne comptez pas que je féminise le mot pour madame Yasmina Reza, comme il est de mode aujourd'hui en confondant la personne et la fonction. L'auteur, donc, en réalité prénommée Evelyne Agnès, est française, fille d'un père iranien et d'une mère hongroise réfugiés. Elle fera des études de théâtre et de sociologie à l'université de Nanterre, ce qui ne sera pas sans conséquence sur son activité d'écrivain, puisqu'elle consacrera principalement son talent à l'écriture de pièces de théâtre de renommée internationale. Elle ne négligera pas pour autant le roman, le scénario et l'essai, c'est dire s'il convenait de consacrer un peu de temps à la découverte de sa production.
L'histoire :
Tout commence par une soirée entre amis bobos de banlieue parisienne, soirée pour laquelle, Elizabeth, la narratrice, insiste auprès de son mari, Pierre, afin que soient invités les voisins du dessus. Ce sera nouveau, intéressant, piquant, drôle, qui sait? La voisine en question, Lydie, une rousse diseuse de bonne aventure à ses heures, poussant la roucoule dans un beuglant jazzy, est mariée à Jean-Lino, un modèle d'effacement et de gentillesse cherchant désespérément à se faire aimer de son épouse et de son beau fils, un exécrable tyranneau domestique.
Au cours de la soirée joyeuse et arrosée, Jean Lino moque sans méchanceté sa virago dans l'intention de requérir l'attention et la considération des convives. Le drame vient de s'enclencher à cet instant précis,car les mots que l'on dit pour rire, sans intention de blesser, peuvent mortifier et produire des gestes funestes. C'est ainsi qu'en pleine nuit, la fête étant terminée et chacun rentré chez soi, Jean-Lino sonne à la porte d'Elizabeth et Pierre : il vient d'étrangler Lydie, et, désamparé, demande de l'aide au couple.
On passe alors sans transition de la satire sociale désabusée au polar loufoque, entre ascenseur et palier avec des protagonistes en tenues de nuit incongrues et une valise rouge contenant le cadavre dont il faut se débarrasser coûte que coûte. On rit beaucoup des situations incongrues, des petites touches acerbes qui font mouche, des sarcasmes qui jaugent la condition humaine sans fioritures
Malgré le burlesque du contexte, le suspense est maintenu tout en étant assaisonné de considérations sombres, ou nostalgiques, désabusées.
Et s'il y a suspense, il n'est pas utile de révéler la fin de l'histoire, bien évidemment
Le style :
Les dialogues sont drôles et percutants comme au théâtre - et pour cause - cocasses ou profonds, jamais ennuyeux, en accord avec des réflexions tour à tour graves ou sarcastiques. Le persiflage côtoie ce désanchantement qui ne larmoie pas mais rend mélancolique parce que l'on sait que les choses passées ne se revivront plus, que l'on est définitivement en exil de son enfance, de ses espérances déçues, de ses bonheurs enfuis et qu'il ne nous reste, comme aux juifs déportés à Babylone par Nabuchodonosor, qu'à nous asseoir au bord des fleuves et à pleurer en nous souvenant de notre Sion personnel. D'où le titre de l'ouvrage.
Au final :
Une histoire plaisante à suivre, légère en apparence seulement, qui se termine de manière abrupte comme toute vie humaine, et nous force à quitter la table avec la faim au ventre.Nous aimerions tant que le livre soit plus épais, comme nous aimerions tant que notre vie soit plus longue que ce qui nous est assigné.
Un écrit intelligent dénué de toute cuistrerie lourde, jamais soporifique.
À lire si l'on veut prendre du plaisr tout en réfléchissant.
Ce qu'en dit la FNAC :
Yasmina Reza, reine de la comédie sarcastique (Le Dieu du Carnage), nous emporte au cour d'une tempête d'émotions où les personnages tous plus paumés les uns que les autres s'aiment autant qu'ils se détestent. Babylone est le siège de dialogues savoureux et de situations si borderline qu'on se surprend à en redemander. Pourquoi ? Parce qu'il y a dans les mots de l'écrivaine un pouvoir cathartique unique. Et comme tout démarre sur un malentendu, on s'amuse des travers de la nature humaine. L'exil et l'abandon ont rarement été traités avec autant de sérieux et de drôlerie.
Éditions Flamarion, 220 pages
Lu en version électronique sur liseuse Kobo
André
Se précipiter sur les prix littéraires dès leur remise n'est peut-être pas le réflexe le plus pertinent; il faut laisser au temps qui passe le soin de décanter l'oeuvre et de voir s'il en reste quelque chose à déguster. Tant d'auteurs et d'écrits "incontournables" portés au pinacle ont disparu corps et biens dans les limbes de l'oubli qu'ont se devrait à la prudence. Je n'y ai pourtant pas cédé, et je crois que j'ai bien fait en l'occurrence.
L'auteur :
Ne comptez pas que je féminise le mot pour madame Yasmina Reza, comme il est de mode aujourd'hui en confondant la personne et la fonction. L'auteur, donc, en réalité prénommée Evelyne Agnès, est française, fille d'un père iranien et d'une mère hongroise réfugiés. Elle fera des études de théâtre et de sociologie à l'université de Nanterre, ce qui ne sera pas sans conséquence sur son activité d'écrivain, puisqu'elle consacrera principalement son talent à l'écriture de pièces de théâtre de renommée internationale. Elle ne négligera pas pour autant le roman, le scénario et l'essai, c'est dire s'il convenait de consacrer un peu de temps à la découverte de sa production.
L'histoire :
Tout commence par une soirée entre amis bobos de banlieue parisienne, soirée pour laquelle, Elizabeth, la narratrice, insiste auprès de son mari, Pierre, afin que soient invités les voisins du dessus. Ce sera nouveau, intéressant, piquant, drôle, qui sait? La voisine en question, Lydie, une rousse diseuse de bonne aventure à ses heures, poussant la roucoule dans un beuglant jazzy, est mariée à Jean-Lino, un modèle d'effacement et de gentillesse cherchant désespérément à se faire aimer de son épouse et de son beau fils, un exécrable tyranneau domestique.
Au cours de la soirée joyeuse et arrosée, Jean Lino moque sans méchanceté sa virago dans l'intention de requérir l'attention et la considération des convives. Le drame vient de s'enclencher à cet instant précis,car les mots que l'on dit pour rire, sans intention de blesser, peuvent mortifier et produire des gestes funestes. C'est ainsi qu'en pleine nuit, la fête étant terminée et chacun rentré chez soi, Jean-Lino sonne à la porte d'Elizabeth et Pierre : il vient d'étrangler Lydie, et, désamparé, demande de l'aide au couple.
On passe alors sans transition de la satire sociale désabusée au polar loufoque, entre ascenseur et palier avec des protagonistes en tenues de nuit incongrues et une valise rouge contenant le cadavre dont il faut se débarrasser coûte que coûte. On rit beaucoup des situations incongrues, des petites touches acerbes qui font mouche, des sarcasmes qui jaugent la condition humaine sans fioritures
Malgré le burlesque du contexte, le suspense est maintenu tout en étant assaisonné de considérations sombres, ou nostalgiques, désabusées.
Et s'il y a suspense, il n'est pas utile de révéler la fin de l'histoire, bien évidemment
Le style :
Les dialogues sont drôles et percutants comme au théâtre - et pour cause - cocasses ou profonds, jamais ennuyeux, en accord avec des réflexions tour à tour graves ou sarcastiques. Le persiflage côtoie ce désanchantement qui ne larmoie pas mais rend mélancolique parce que l'on sait que les choses passées ne se revivront plus, que l'on est définitivement en exil de son enfance, de ses espérances déçues, de ses bonheurs enfuis et qu'il ne nous reste, comme aux juifs déportés à Babylone par Nabuchodonosor, qu'à nous asseoir au bord des fleuves et à pleurer en nous souvenant de notre Sion personnel. D'où le titre de l'ouvrage.
Au final :
Une histoire plaisante à suivre, légère en apparence seulement, qui se termine de manière abrupte comme toute vie humaine, et nous force à quitter la table avec la faim au ventre.Nous aimerions tant que le livre soit plus épais, comme nous aimerions tant que notre vie soit plus longue que ce qui nous est assigné.
Un écrit intelligent dénué de toute cuistrerie lourde, jamais soporifique.
À lire si l'on veut prendre du plaisr tout en réfléchissant.
Ce qu'en dit la FNAC :
Yasmina Reza, reine de la comédie sarcastique (Le Dieu du Carnage), nous emporte au cour d'une tempête d'émotions où les personnages tous plus paumés les uns que les autres s'aiment autant qu'ils se détestent. Babylone est le siège de dialogues savoureux et de situations si borderline qu'on se surprend à en redemander. Pourquoi ? Parce qu'il y a dans les mots de l'écrivaine un pouvoir cathartique unique. Et comme tout démarre sur un malentendu, on s'amuse des travers de la nature humaine. L'exil et l'abandon ont rarement été traités avec autant de sérieux et de drôlerie.
Éditions Flamarion, 220 pages
Lu en version électronique sur liseuse Kobo
André
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